17 mars 2014

49 - Flore (encore...)


Les émotions n'ont parfois pas assez de mots. Surtout quand elles vous submergent autant : Ma première réaction a été instinctive, émotive, bestiale.
Avec un peu de recul, je sais qu'il s'est passé encore plus de choses, dans ce minuscule mais intense instant.

La rencontre avec notre enfant est un gros choc, et j'imagine que l'inverse est vrai aussi. Mais ça, on n'y pense pas vraiment, on ne l'intellectualise pas, en fait, que sait-on de ce que pense notre tout-petit ?

Quand nous sommes arrivés dans la crèche, Flore était parée, avec une coiffure très complexe, de beaux vêtements et des chaussures (alors qu'ils n'en mettent pas souvent, là-haut, sur la terrasse qui est leur unique lieu de vie), assise sur les genoux d'une bénévole, avec une haie d'autres bénévoles d'un côté, Dixie de l'autre... bref, tout un protocole très impressionnant pour nous mais surtout pour la petite.

Son quotidien a été complètement bouleversé : Elle n'a pas fait la sieste du matin, on l'a longuement préparée, on lui a expliqué qu'elle allait nous rencontrer, on l'a séparée des autres, la sortant de son univers, la menant dans un lieu inconnu.
Quelle situation stressante, peu compréhensible pour un bébé de seize mois !
Dans un premier temps, j'ai été fâchée de cette mise en scène angoissante. Pourquoi ne pas aller la chercher dans son lit, tranquille, au milieu des autres enfants, la découvrir dans son univers, en douceur, sans trop la perturber...

Puis, avec le recul, je me dit que cela aurait été faire ce qu'accomplissent chaque jour toutes les nounous ou les bénévoles qui s'occupent des enfants.
Sauf que je ne suis ni une bénévole ni une nounou : je suis sa mère.
Notre rencontre méritait donc d'être forte et marquante, ce qui implique forcément le choc, le stress, les décharges d'adrénaline et quelques sanglots.
Oui, finalement, à la réflexion, je trouve que ce protocole lourd est exactement ce qu'il faut : mon enfant a fait la rencontre de sa vie : celle de son papa et de sa maman !
Même sans tout comprendre, Flore a su ainsi que quelque chose de grand et d'essentiel se passait pour elle et pour nous.

On dit que la naissance est un traumatisme. Cette deuxième naissance l'a été aussi.

Et puis, les enfants ont cette capacité à s'adapter qui m'épate toujours : Je garde en mémoire le regard intense de Flore, qui petit à petit se lâche et me pénètre, et je lis en elle sa façon retenue mais grandissante de nous accorder sa confiance.

Elle s'abandonne enfin, nous ne nous quittons plus.
A peine une heure après notre rencontre, Flore s'endort, couchée sur moi, sa tête sur ma poitrine.
Pour une longue sieste de trois heures.
Moi, je ne dors pas.
Je ne peux cesser de regarder ma fille, et de prononcer ce mot qui résonne enfin dans la réalité.

Pendant trois heures, je reste sans bouger, mon enfant sur le ventre, heureuse.

10 commentaires:

  1. Quelle émotion! Que dire en mots de ce que vous avez dû ressentir tous les 3? A mon avis ils sont bien pauvres au regard de la puissance et de l'intensité, de la force de ce que vous avez vécu à cet instant précis! C'est beau...tout comme cet amour instinctif qui vous a liées toutes les 2 quasi immédiatement! J'aime.

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    1. Je pense en effet Evelyne que ça a été instinctif. Immédiat déjà quand j'ai reçu sa photo lors de l'attribution, puis dans un deuxième temps quand je l'ai rencontrée "en vrai".
      Incroyable, hein, cette façon en deux étapes (enfin, si on peut dire, ce serait même plus...) de devenir maman !
      Merci de ton commentaire ;-)

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  2. Je lis complétude, plénitude. J'adore !

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  3. ahhhh...la premiere sieste sur maman....!! :o)
    des bisous !
    Sylvie

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    1. Et je t'assure que je n'ai pas vu les trois heures passer, tellement j'étais fascinée par cette petite bonne femme ;-)
      Bisous itou ! ;-)

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  4. Très joli texte ! On ressent vraiment l'émotion de cette rencontre. Magnifique.

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    1. Merci, "Chouette" (joli prénom ;-))
      Et encore, je n'ai pas pu retranscrire ce qu'il y avait vraiment tout au fond de moi, et ce que je ressens encore, 9 ans plus tard... ;-)

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